La vie nocturne à Montréal
Δ.Μ.: Quand nous sommes arrivés, ici au Canada, après que…dès qu’ils ont commencé à me payer au restaurant, je lui dis : « Frère, allons à Montréal ». « Pour faire quoi? ». « Vie nocturne... », je lui dis, « Bouzoukia, salles de billard, cinémas ». Et mon père nous a amené ici pour ramasser de l’argent, disons, tu comprends? Nous, dès que nous recevions notre paie, vite à l’autobus – nous ne parlions pas un mot d’anglais – nous prenions l’autobus, euh…tôt, nous descendions à…à Montréal, nous sortions de la station d’autobus, maintenant… « Comment allons-nous aller aux endroits où sont les Grecs? ». Je regarde un type à travers la rue, il attendait à l’arrêt d’autobus, je dis lui il semble être Grec. Nous ne parlions pas. Je dis « Je vais aller lui demander ». « Non », il me dit « Il n’est pas grec ». J’y vais, je dis « Pardonnez-moi », je lui dis « Grec? ». « Grec ». « Pardonne-moi, mon ami » je lui dis « Quel autobus m’amènera à l’endroit où…où sont les Grecs? » Il me dit « Ça s’appelle l’Avenue du Parc, l’Avenue Grec ». « Oui, quel autobus? » « Le 187 ». Il dit « Attendez, je vous amènerai ». « Non », je lui dis « Où vas-tu? ». « Je vais à mon travail ». « Non, va au travail ». « Non, non. C’est à Montréal ». En tout cas, l’homme a quitté l’autre arrêt pour nous amener, disons, je lui dis « Descendras-tu pour que je t’offre un ouzo, quelque chose? » « Non, il faut que je rentre au travail. Merci beaucoup ». À partir du moment où nous avions appris le trajet d’autobus, à chaque deux semaines nous allions à Montréal, disons.
EP.: Le Montréal était-il connu pour le divertissement grec?
Δ.Μ.: Ah, Montréal est…Je l’aime! Divertissement grec. Cinémas, salles de billard. Oui, oui.
EP.: Et vous y allez à chaque deux semaines?
Δ.Μ.: À chaque deux semaines quand nous recevions notre paie. Écoutez, nous prenions…à l’époque nous gagnions quatre-vingts dollars, nous laissions les soixante à mon père pour l’aider, vingt moi, vingt mon frère, et nous allions à Montréal. Dans le temps, avec vingt dollars tu étais bien.
EP.: Et à quels endroits allez-vous, vous vous rappelez?
Δ.Μ.: Nous allions à ‘Meraklis’ et nous mangions des souvlakis et autres. À Rialto, c’était un cinéma avec des films grecs et nous avions aussi un ami qui était venu avec nous sur le même bateau – lui il était à Montréal – il se nommait Georges Diamantakos, et il travaillait à l’aéroport. Lui, il parlait l’anglais quand nous sommes arrivés avec le bateau et je lui dis : « Euh toi… » et je lui dis « Tu parles l’anglais? ». « Un peu, un peu ». Je lui dis « Cette meuf » je lui dis « Elle me regarde ». Je lui dis « Elle veut danser » je lui dis. À l’intérieur de la discothèque. Le bateau avait aussi un bar à l’intérieur. Je lui dis « Son père porte un chapeau de marin ». « Ok » il me dit « je vais m’en occuper ». Il y va…moi j’étais un peu plus loin, je l’écoutais. Il dit « Ton père est le ‘pliarchos’ (capitaine) ». [Rire]. « Ah », je dis, « Comme ça…moi aussi je les connais ». « Non », elle luit dit « non, non, non », lui dit la fille. Il dit « Mon ami veux danser ». « Oui », elle lui dit « D’accord ». Ce gars, en tout cas, et nous nous voyions– il faisait beaucoup d’argent, il travaillait comme serveur à l’aéroport – et aux bouzoukia et…et nous n’avions pas d’hôtel. Nous restions chez sa sœur. Elle avait un appartement là.
EP.: Et où alliez-vous pour les bouzoukia?
Δ.Μ.: Bouzoukia nous allions à ‘Fantasia’…je ne me rappelle pas. Tu parles d’il y a quarante-cinq ans. Plusieurs années. Et oui, aux bouzoukia avec ce gars-là, il connaissait aussi toutes les ruses.
EP.: C’est-à-dire à Ottawa...
Δ.Μ.: Par la suite, nous les avions appris, nous allions…Moi, n’importe quelle meuf que je trouvais ici, puisqu’elles habitaient toutes avec leurs parents, pour les éloigner de leurs parents, nous irons magasiner à Montréal. « Tu sais… » elle me disait « Les boutiques? ». « Tout, tout, tout, au centre-ville ». Oui, effectivement je les connaissais. J’ai fait le tour de Montréal à pieds. Je connaissais toutes les rues et je les amenais toutes à Montréal, afin d’éviter que nous nous fassions remarquer sur la rue ici, tu sais. Je faisais attention. Oui, oui. Le Montréal est mon amour.
EP.: Et ici, à Ottawa, il n’y avait pas de bouzoukia? Il n’avait pas de…?
Δ.Μ.: Il n’en avait pas, dans le temps. Par la suite, quelques-uns sont ouverts. Après…deux-trois ans plus tard, des bouzoukia sont ouverts, et des folies. Ils gaspillaient leur argent. Beaucoup d’argent. Nous essayions de montrer qui était meilleur que l’autre. Qui gaspillera le plus d’argent aux bouzoukia, disons. Conneries, en tout cas. Bien.
EP.: Et les bouzoukia, comment s’appelaient-ils, ici à Ottawa?
Δ.Μ.: ‘Parthénon’ et par la suite… il y avait un autre qui s’appelait…français…il s’appelait ‘Jardins Grecs’. Attends… ‘Jardin Grec’…’Jardin Grec’…quelque chose comme ça. Oui, ici au centre-ville. Nous avions deux bouzoukia. Maintenant, il ne reste plus rien.